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Les méandres sexistes du journalisme sportif
Pendant Roland-Garros 2015, la marque Longines a organisé une journée promotionnelle avec la présence de son ambassadrice Steffi Graf. Deux journalistes (une femme et une homme) de L'équipe en ont rédigé un article.
Le journaliste a rédigé un post de blog qui évoque une championne heureuse, sereine et élégante à la tête d'une fondation qui prend en charge des victimes de traumatismes (voir ici). L'ancienne n°1 mondiale est abondamment citée, le rédacteur a pleinement conscience de la valeur de cette rencontre... avec lui-même! A tel point qu'il en oublie d'accorder "rencontré" dès l'introduction. Le temps d'un petit-déjeuner, il parvient à faire "avouer" la joueuse, il discerne clairement son "but ultime", le débat est fluide et les questions s'y invitent "logiquement". Quel maître intervieweur! Steffi ne lui résiste pas.
La journaliste a écrit une page publiée dans L'équipe Magazine du 13 juin. Elle explique dès la 1ère ligne qu'on lui a proposé d'aller se mesurer à une légende du tennis. L'échec inévitable n'est donc pas de son initiative. On apprend quelques lignes plus tard qu'elle ne pratique pas le tennis. Ses phrases sont à deux personnes du singulier. La division grammaticale créé la confusion des personnes: "je" est écrit en "tu" et "elle". Tu/elle prend·s des conseils de dernière minute, tu/elle se présente·s comme inapte en anglais, ne fais/fait aucun mystère du stress éprouvé. Tu/elle n'a·s commis aucune faute mais termine·s l'article dans la repentance!
Ainsi, le lectorat a tout le loisir d'associer une rédaction posée à un homme et une rédaction explosée à une femme. L'équipe prend soin de mettre son journaliste dans une situation valorisante et de mettre sa journalistes en position d'infériorité. Et ça se donne à lire à chaque ligne de chaque article.
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